De la prison d’Osny à la Palestine, itinéraires d’éducation populaire

En plein Covid, le 21 avril 2020 (quel timing !), est paru chez L’Harmattan mon dernier livre : « Comme une naissance… ». Autant dire que c’est passé inaperçu… En plein naufrage sanitaire, nous avions d’autres chats à fouetter… Retour sur cette édition d’un livre co-imaginé et réalisé intimement avec René Badache et Guy Millérioux. Leurs récits de vie comme témoignage d’une époque et d’une façon concrète de mettre en actes l’éducation populaire.

Mon point de départ : en quoi la croyance en l'éducation populaire s'incarne-t-elle chez René et Guy au-delà des (généreuses) intentions et autres discours assez répandus dans ce milieu... parfois peu suivis d'effets concrets, voire contre-productifs...

Photo de couverture du livre Comme une naissance de Catherine Lesauvage
Photo de couverture du livre Comme une naissance de Catherine Lesauvage

En effet j’ai passé toute ma vie, dans différentes associations dites d’éducation populaires et j’en ai vu des vertes et des pas mûres. Faites ce que je dis mais pas ce que je fais. Longs (très longs) discours anticapitalistes ou sur l’émancipation sans contenus manifestes derrière, ni prises avec le réel. Interminables réunions où de gentils leaders nous inondent de démarches constructives pour nous associer à des décisions déjà prises. En général, plus les propos étaient (sont) radicaux, plus la gestion interne elle-même de ces associations laissent à désirer, notamment dans les rapports avec les salariés, les bénévoles et aussi les publics. J’avoue être moi-même pris dans ces contradictions.

Guy Millérioux et René Badache
Guy Millérioux, à droite, a été formateur et directeur aux Centres d’entrainement aux méthodes d’éducation active (Ceméa), René Badache est comédien à Arc-en-Ciel Théâtre Ile-de-France (Actif)

Le cursus de René et Guy m’est alors apparu comme un baume apaisant. Leurs pratiques éducatives, formatives ou culturelles, de ce que j’en ai vu, de ce qu’ils en disent, sont réellement au service des publics qu’ils côtoient avec une exigence bienvenue mais aussi une volonté que chacun puisse s’emparer de ses propres choix. Idem pour Guy dans sa direction d’équipe dont je n’ai jamais connu ailleurs une telle pertinence sur le fond et la forme. Le surplomb militant (je vous veux du bien malgré vous et sait mieux que vous ce qu’il vous faut) est inconnu au bataillon (ou très peu). Cela n’a l’air de rien mais c’est diablement rare.

J’y ai pris le meilleur même si je peine toujours à la tâche.

Ce qui m’a séduit aussi dans cet essai : essayer de comprendre ce processus du transfert. En quoi ai-je pu (suis-je encore), m’identifier à ces mentors dont le credo est justement de tenter d’effacer la question de la seule expertise, de la domination subie ? Je n’ai pu (ne peux) m’empêcher une certaine fascination pour leurs parcours, leurs maîtrises d’œuvre.

Car même si « Personne n’éduque personne, personne ne s’éduque tout seul, les hommes s’éduquent ensemble… » comme le postule joliment Paolo Freire, comme dirait Coluche il y en a qui sont plus égaux que d’autres !

De la prison d’Osny à la Palestine, d’Oran au Berry, des attentats de 2015 à Paris au Niger, Guy et René trimballent leur valise en carton de magiciens de l’ordinaire. De leurs chapeaux sortent des histoires, des anecdotes, des rires émus et parfois de vrais lapins qui vont courir dans l’herbe fraîche.

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- Jean-Pierre Weyland